Islam, Vote et Démocratie

Conclusion

par Anthony Ghelfo 2019

Cet écrit a été le fruit dʼune longue réflexion qui sʼest déployée suite à certains silences observés sur des points précis, concernant le vote et la démocratie en lien avec lʼislam. Si les savants et les imams, dans leur majorité, appellent les musulmans à se responsabiliser et à sʼinvestir politiquement dans la société, les arguments du discours exprimé ne parviennent pas toujours aux fidèles, et des interrogations restent en suspend. Ce livre vient renforcer et compléter lʼargumentation en sʼappuyant sur des références islamiques authentiques, convergentes avec le patrimoine universel de lʼhumanité.

Nous avons ainsi commenté et réfuté une vidéo, en la prenant pour exemple. Ce qui nous a permis de relever les arguments types, de lʼavis consistant à sʼabstenir de voter en Occident. Les erreurs qui nous parvenaient, étaient répétées à maintes reprises sur la toile, sous tous les formats, et ceci par une absence de méthodologie. Mais ce simplisme dans la religion, mettant de côté de nombreuses sources, engendre la pensée sectaire, et fait scission avec le reste du peuple. Cette vision idéologique ne correspond pas avec ce que nous a laissé lʼislam comme exemples, ni avec la conception du modèle social français, loin du communautarisme anglo-saxon, très fantasmé chez les jeunes musulmans.

Mais il nʼest pas question de jeter la pierre sur cette jeunesse qui, par hâte de transmettre le message de paix que lʼislam nous fait parvenir, est parfois dans une exagération, au point de vouloir être en rupture avec la société occidentale. Derrière un groupe manipulé, il y a toujours des manipulateurs. Cette stratégie du choc des civilisations reste toujours en filigrane derrière ces questions. Mais un mal appelle toujours un bien. Par ces erreurs et ces déviances, que nous avons pu identifier, cela nous a permis de corriger et de perfectionner notre conception de lʼislam, au point dʼen avoir désormais une maîtrise dans des sphères que nous ne soupçonnions même pas avant de commencer cet ouvrage. Ce qui nous a protégé de la déviance et dʼune conception sectaire de la religion, contrairement à nombreux de nos paires, nous pensons que cʼest avant tout par notre rigueur méthodologique face à la science.

Tout repose sur une bonne méthodologie. Si celle-ci fonctionne pour révéler le vrai, même avec peu de connaissances, vous retomberez sur la sagesse des anciens, et cela, par le principe universel, que rappelait Ibn Rushd (Averroès), consistant à dire que la Vérité ne peut contredire la Vérité. Quand nous avons commencé notre projet Redécouvrir Dieu par la Raison, nous avons été témoin de ce phénomène, à nombreuses reprises. Combien de fois avons-nous rédigé des sagesses que nous avions déduites du Coran, sans même savoir que le Prophète tenait déjà de tels propos, par notre manque de connaissance de ses paroles ?

Partir sur de bonnes bases est aussi un bon moyen de continuer à cheminer vers le vrai. Mais une bonne méthodologie serait normalement capable de remettre en question vos fondements si ceux-ci devenaient trop contradictoires avec le réel. Cʼest dʼailleurs cette rupture du réel qui caractérise les sectes. Au-delà du manque de science, sous prétexte dʼun message qui promet le paradis à celui qui « se soumet » à Dieu, il faudrait justifier une « Législation Divine » à observer. Tout cela ne repose que sur des spéculations et des confusions linguistiques, dont les sectes de lʼislamisme politique se sont contentés de relayer pour asseoir leur soif de pouvoir et leur contrôle sur les musulmans.

Le vote serait alors un acte de shirk ? Comment un acte de libre expression, pourrait-il être contraire à lʼislam ? Comment le témoignage et la responsabilisation des musulmans sur le plan politique, pourraient-ils être une mauvaise chose, quand lʼexemple du Prophète et des Compagnons en sont les exemples les plus significatifs. Parmi les principes dʼune bonne méthodologie, il y a la bonne définition et la contextualisation de lʼobjet que lʼon souhaite étudier. Cʼest une clé de lʼargumentation solide qui permettra de gagner nʼimporte quel débat, et de partir sur de bonnes bases. Ainsi, lʼacte dʼassociation (shirk) nʼa jamais existé en dehors de lʼhomme. Il nʼy a pas de shirk naturel dans la Création. Au contraire, cʼest le fait dʼassocier Dieu à Sa Création, qui définit le shirk. Ainsi, seule la responsabilité de lʼhomme, par son orgueil et son libre-arbitre peut devenir un associateur (mushrik). Être mushrik est un état dʼâme, comme être muslim lʼest tout autant.

Par ce même principe de retour aux sources, nous avons approfondi la question de la démocratie, en se basant sur les travaux dʼun homme qui restera dans lʼhistoire de France pour avoir tenu des propos révolutionnaires, et qui, certainement sans le savoir, nous a permis de déduire des enseignements du Prophète sur la gouvernance en islam, ainsi que sur la nature du « califat ». Tout homme qui recherche la justice pour la Justice, la vérité pour la Vérité, finira par retomber sur les enseignements prophétiques.

Ainsi, en remontant tous les rouages du pouvoir pour en comprendre le fonctionnement, tout en distinguant ce qui relève du temporel et du spirituel par un travail effectué en amont, sujet de confusion chez les islamistes, nous avons pu ouvrir une brèche. Une fenêtre qui, pour celui qui souhaitera la franchir, lui permettra de faire partie de ceux qui permettront de rendre un peu plus de justice demain en France.

Sʼil y a des injustices en France, cela signifie que les règles du pouvoir sont mal écrites, et quʼelles ne rendent pas service au bien commun. Les principes du régime en question sont inscrits dans la Constitution, texte censé être au plus haut du droit, mais est aujourdʼhui sous la tutelle de lʼUnion Européenne, malgré le rejet des Français dʼune constitution européenne en 2005, par référendum.

Nous espérons alors que ce petit livre poussera les musulmans de France à sʼinvestir ou sʼintéresser à minima à la rédaction dʼune Constitution, en suivant lʼexemple du Prophète et des Muhâjirûn, qui vécurent un processus constituant en sʼinstallant à Médine. Car cʼest le moment de refonder une nouvelle France, grâce à cette autre brèche historique et incroyable dans les événements que représente le mouvement des gilets jaunes. Même si nous ne savons pas quelle sera lʼissue de cette révolte spontanée et légitime, concentrer ses efforts sur les principes constituants, comme le référendum dʼinitiative citoyenne, permettrait de rendre un souffle démocratique dans notre pays.

Kab ibn Ujrah a déclaré : Le Messager dʼAllah est venu vers nous. Nous étions neuf. Il a dit : « Il y aura des dirigeants après moi, qui mentiront et seront injustes. Quiconque croit en leurs fausses promesses et les aide dans leurs injustices n’a rien à faire avec moi ; je n’ai rien à faire avec lui. Il ne boira pas de mon hawd [de mon bassin]. Quiconque ne croit pas en leurs mensonges, et ne les aide pas dans leurs injustices, alors cette personne est avec moi et je suis avec lui. Il pourra boire de mon hawd [de mon bassin]. »

Rapporté par an-Nasai

Et Dieu reste le plus Savant...

Mustapha Abû Oumama, conférencier et professeur dʼarabe, auteur du projet de lʼOasis de lʼExcellence, avec qui nous avons échangé brièvement par mail, faisait remarquer que contrairement à beaucoup de musulmans de notre âge, il était étonné de notre absence de sectarisme dans notre conception de lʼislam.

Compagnons du Prophète ayant migré à Médine.

Sunan an-Nasa’i, n°4207

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